Définir et mobiliser la notion d’intersectionnalité

Forgée à la fin des années 1980 par la juriste africaine-américaine Kimberlé Crenshaw dans le contexte de la naissance du Black Feminism aux États-Unis, « l’intersectionnalité » est devenue un « hit concept » – pour reprendre l’expression d’Elsa Dorlin [2012] – dans le monde universitaire et militant français depuis les années 2000. D’abord conçu comme un outil critique du droit étatsunien visant à faire reconnaître l’imbrication de plusieurs types de discriminations dans un contexte juridique qui les segmente, le concept d’intersectionnalité est aujourd’hui largement mobilisé par les sciences humaines et sociales pour penser le caractère multidimensionnel de la construction des rapports de pouvoir et de domination. Si le tryptique « classe, genre, race » est désormais devenu classique, l’âge, le lieu de résidence, la religion, l’orientation sexuelle peuvent également être mobilisées comme catégories d’analyse intersectionnelle. Dans l’analyse des données collectées lors des ateliers et entretiens de la recherche Pop-Part, l’imbrication de ces différentes dimensions de la construction des identités et de la production des rapports de pouvoir apparaît comme un axe d’analyse fécond. Ce séminaire aura ainsi pour objectif de constituer un socle théorique commun aux différent·e·s participant·e·s de la recherche Pop-Part autour du concept d’intersectionnalité. Nous reviendrons sur sa généalogie, ses apports et ses limites dans les sciences humaines et sociales. Nous aborderons les enjeux
épistémologiques, éthiques et académiques que pose ce concept dans le monde universitaire et tenterons enfin d’aborder les difficultés méthodologiques et analytiques d’une lecture intersectionnelle d’un matériau empirique.